Un pied sur le dancefloor, l'autre dans le laboratoire, voilà l'image qui convient pour tenter de résumer la carrière protéiforme du producteur de Francfort Roman Flügel. Avec cet avant-dernier album, on se situe du coté du Down Tempo climatique et dantesque plutôt que dans la bave aux lèvres extatiques. L'Ambient et l'IDM dominent outrageusement mais le groove, tapi dans l'ombre, peut surgir à chaque instant.
lundi 29 avril 2024
On aime beaucoup le catalogue du label Alien Transistor, le label allemand fondé par les frères Acher (Markus et Micha) du groupe Post Rock The Notwist. En voici une nouvelle preuve avec l'Electro Mid-Tempo à haute teneur cinématique de Saroos, superbe trio dans lequel on trouve un autre membre de The Notwist ainsi que de Lali Puna. Bref, nous sommes entre gens bien.
Il s'agit d'un producteur lituanien (Liudas Lazauskas de son vrai nom) actif depuis 2016 et qui, après une douzaine de EP, a sorti en 2023 son véritable premier album accompagné des inévitables remixes. Musicalement, on se situe dans ce nouveau courant que nous qualifierons d'Electro Dark Disco, où comment pervertir le dancefloor grâce aux ténèbres
Plus besoin de vous présenter notre chouchou polonais, meilleur producteur d'Electro House groovy du pays depuis plus de 20 ans (cf. ici). On aime particulièrement sa série Dirtcuts qu'il sort sur sa propre structure du même nom.
dimanche 28 avril 2024
Première adaptation du très beau livre de Daniel Keyes au cinéma, Charly est clairement marqué par son époque Woodstock. C'est une émouvante histoire à laquelle on nous convie, originale, parfois drôle, souvent triste. Le sujet est sensible : après une expérience, un sympathique handicapé mental devient supérieurement intelligent avec tout ce que cela implique. Musicalement, l'immense Ravi Shankar nous propose un score délicat où la sitar a bien évidemment la part belle. Son pouvoir relaxant et hypnotique demeure 56 ans après les faits.
Deep House groovy aux arrangements soignés pour ce duo allemand composé de John Muder et Nils Penner, actif depuis 15 ans sur le label Moodmusic. L'opus qui nous occupe est un voyage à travers l’univers sonore de P+M, il y a de la profondeur et de la légèreté, de la mélancolie et de la joie, de la douceur et de la dureté, avec à la fois des éléments organiques et électroniques. Nous sommes emmenés dans des aventures épiques avec des morceaux comme 69 Minutes avec ses delays flottants, ses harmonies de chair de poule et ses basses fréquences massives, modulées à la perfection. Il y a des clins d’œil à Chicago comme à Détroit, comme les grooves et les voix déformées de 24 Hour Ticket, qui rappellent les pionniers de la techno comme Model 500.
Un vieux de la vieille de la French Touch, éternel second couteau de la House filtrée (mais pas que...), déjà là en 1998 sur Vesatile Records, toujours là 25 ans après sur sa propre structure Atavisme. Deep, moite, funky et groovy, sa recette non plus n'a pas changé pour notre plus grand bonheur.
samedi 27 avril 2024
Penguin Café Orchestra est un collectif au line-up mouvant mais centré sur le musicien britannique Simon Jeffe qui, dés 1976 sur le label de Brian Eno Obscure Records, produisit une esthétique inédite opérant le rapprochement entre Jazz, musique minimaliste à la Philip Glass et musiques traditionnelles issues des cinq continents. Jeffe a toujours dit que le concept du "Penguin Café" lui était venu dans un rêve alors qu'il souffrait d'une intoxication alimentaire dans le sud de la France à l'été 1972, après quoi il a écrit un poème qui commençait par "Je suis le propriétaire du Penguin Café, je vais vous dire des choses au hasard. Il a décrit la musique du groupe comme « de la musique de chambre semi-acoustique moderne ». Après la mort de celui-ci en 1997, son fils reprend le flambeau en 2009 sous le nom Penguin Café dans la même veine. Union Café est le dernier album en date de la première mouture, et a matter of life est le deuxième album du Penguin Café, l'occasion est trop belle pour constater que le passage de témoin s'est fait sans problème.
vendredi 26 avril 2024
Derrière Patricia se cache un homme, Max Ravitz, producteur de Chicago adepte de Minimal, de Deep House et d'Acid via 6 albums sortis depuis 2013. C'est un concepteur sonore accompli et un compositeur de musique trouble et mélodique conçue pour susciter le mouvement du corps. Sa présence sur le catalogue du remarquable label Ghostly International devrait vous mettre la puce à l'oreille.
Encore un magnifique exemple de score tendu comme un string pour un bon vieux film d'action italien de 1979 réalisé par Antonio MARGHERITI avec Lee Van Cleef et la papesse de la série B Karen Black. Au commande du score l'on retrouve Paolo Vasile que l'on retrouvera un an plus tard à la tête de la BO du Jour du cobra d'excellente facture. Au programme du groove, du funk et du jazz !
Duo gallois opérant chez le mastodonte label XL Recordings et produisant depuis 2016 une Electro particulièrement groovy. Connu pour ses sons contagieux et taillés pour le club, avec un amour aiguisé de la rave music, du breakbeat et de la transe des années 90, les frères Tom et Ed Russell ont explosé pendant le confinement avec ce EP et ils n'ont cessé de confirmer leur talent par la suite.
Formation lilloise active depuis 2012 et auteur de 3 albums de Post Rock tendance guitares fortes à longue divagation spectrale. Selon eux, "“Je pense une chose, j'en dis une deuxième, j'en fais une troisième ". Partant de ce postulat anodin, les Oui Mais Non jouent un rock instrumental polymorphe. Tantôt égaré en pleine savane, tantôt stoïque, tantôt frénétique, ce trio, quatuor, quintet vogue tel une carpe dans des ruisseaux noise, post rock et krautrock. Tout est dit.
30 ans de carrière pour ce producteur hollandais qui a opéré un fertile rapprochement entre le son old-school de Detroit et la modernité Minimal allemande du label Kompakt, autrement dit le mariage jouissif entre le feu et la glace sur le dancefloor, où les aventures d'un Carl Craig outre-rhin.
Fondé en 2006 par Vincent Bertholet, l'Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp est un projet particulièrement foutraque qui force le respect. Conçu comme un véritable orchestre, la taille de l’ensemble n'a cessé de varier afin de démontrer que la formule "plus on est de fous, plus on est de fous" n'a jamais été aussi vraie, notamment sur scène. Avec un nom à la fois hommage aux groupes traditionnels africains - Orchestre Tout Puissant Konono n°1, Orchestre Tout Puissant Polyrytmo etc... - et à l'un des plus grands dynamisateurs de l'art du XXème siècle), le groupe épouse les formes de ses musiciens tout en les poussant dans leurs retranchements. Le résultat est un son organique puissant, expérimental, instable et terriblement vivant. Ces caractéristiques se retrouvent sur We're OK. But We're Lost Anywhere, cinquième opus du groupe. Mélangeant free jazz, post punk, high life, brass band, mélanges symphoniques et krautrock, leur son ne fait que dépasser les limites des genres. Transcendantale, presque rituelle, la musique se double de paroles puissantes, déclamées avec rage contre un monde qui s'effondre. Adorciste, hypnotique et post-syncratique, l'Orchestre Tout Puissant Marcel Duchamp, loin du manifeste de Tzara, se situe entre les psaumes phonétiques de Hugo Ball, une procession soufie qui vire à la bagarre et un rituel vaudou, mais toujours avec une précision propre à la monomanie. d'un asperger.
Easy, Jazz-Funk, Disco, tout est bon dans l'univers de Walter Rizzati, grand compositeur et figure essentielle de la musique pour l'image en Italie depuis le début 70's. Créateur génial et protéiforme (il a écrit des scores pour des films allant de l'horreur à la série des Bud spencer), il a côtoyé tous les styles avec toujours le même souci d'efficacité mélodique.
jeudi 25 avril 2024
Il s'agit d'une indispensable compilation regroupant les travaux du producteur danois Opiate alias Thomas Knak, boss du label Hobby Industries et que l'on connaît notamment pour sa collaboration avec Alva Noto alias Carsten Nicolai. Vous l'aurez compris, il s'agit ici d'Electronica Minimale, abstraite et froide, aux pouvoirs hypnotiques quasi surréels. On y trouve donc beaucoup de vide et d'échos profonds, parfait contrepoint à divers grésillements et autres accidents numériques électroniques. Le Post Rock façon To Rococo Rot / Tortoise n'étant pas loin non plus, nous nageons dans le bonheur et vous aussi.
Oliver Leith est un compositeur basé à Londres qui crée de la musique acoustique, de la musique électronique et de la vidéo. Des commandes ont été données par des groupes tels que London Sinfonietta, Festival Aix-en-Provence, le London Symphony Orchestra, Tanglewood Music Festival, Heidelberg festival, Musicon, Homo Novus/Valmiera Theatre et St John Smith's Square. On a donc affaire à du sérieux, en l'occurrence de l'Ambient formidablement cinématographique avec de légères percussions rythmiques et quelques notes de piano pour agrémenter le tout, le résultat étant aussi splendide que captivant. C'est maintenant à l'auditeur d'être à la hauteur en tant que metteur en scène de ses propres images mentales qui tenteront d'égaler ce son proche d'un certain Brian Eno.
Projet collectif drivé par Frederic Oberland et Stephane Pigneul (Ulan Bator) et dans lequel on retrouve le producteur électronique Mondkopf et le batteur Jean-Michel Pirès (Married Monk, Bruit Noir), Oiseaux-Tempête propose une odyssée sonore grandiose à base de Post Rock psychédélique et de Free Jazz sans limite particulièrement proche de l'esthétique du label canadien Constellation et de ses groupes phares que sont Godspeed You Black Emperor ou Fly Pan Am. C'est aventureux et jamais ennuyeux, la présence sur le catalogue du toujours vert label Sub Rosa étant amplement justifiée.
On remet une couche (cf. ici) sur le cas Christopher Leary et son Electro rêveuse sous forte influence Boards Of Canada. L'opposition entre grésillements électroniques et nappes cotonneuses produit un espace sonore qui laisse libre cours à notre imagination d'auditeur en quête de nouvelles sensations.
vendredi 19 avril 2024
Dernier album en date signé sur le label de Chicago Thrill Jockey pour un duo (Brendon Anderegg et Koen Holtkamp) pratiquant un Ambient aux constructions lentes et aux transformations subtiles, avec des textures et des lignes mélodiques qui évoluent de diverses manières pour créer de grands paysages sonores et des compositions extrêmement détaillées avec des combinaisons d'enregistrements purement acoustiques et des sons purement électroniques. Guitare, violoncelle, orgues, piano électrique et bien plus encore sont parfaitement mélangés avec des composants électroniques modulaires, des synthétiseurs et d'autres sources sonores. Le résultat est une écoute totalement captivante, changeant toujours d’orientation entre les instruments acoustiques, les instruments traités et le son électronique.
Finalement il s'agit là du parcours classique d'un ancien punk des 80's qui découvre les joies du Post Rock dans la deuxième partie des 90's. Mick Turner est australien et, après divers combos Rock obscures, se lance dans l'aventure du Post Rock climatique et hypnotique à base de longues divagations guitaristiques lentes et crépusculaires au sein du génial trio The Dirty Three en compagnie de Jim White et de Warren Ellis, futur compagnon de route de Nick Cave période soundtracks sublimes. On le retrouve aussi dans Boxhead Emsemble, inoubliable collectif de Chicago produisant une musique de chambre spectrale et dantesque. Il y a aura aussi l'expérience Tren Brothers avec le seul Jim White. Et enfin Mick Turner en solo avec 4 albums au compteur, longue odyssée Ambient qui laisse l'auditeur ébloui dans un état comateux au milieu des grands espaces.
Version remixée du EP sorti en 2021 qui voit les chansons sensibles du songwriter de Depeche Mode se revêtir de magnifiques textures électroniques sombres par la grâce et le talent de remixeurs obscures nommés The Exaltics, Rrose, Anna ou Barker. Et l'on se dit avec lucidité et amertume que c'est exactement à cela que devrait ressembler les albums récents de Depeche Mode, en lieu et place des mid-tempos souvent lourdingues et régulièrement alourdis inutilement par la voix de Castafiore de David Gahan.
On a déjà évoqué ici le cas de Maps & Diagrams alias Tim Martin, expert britannique en matière d'Ambient / Electronica. On remet donc le couvert avec son 3ème album et un EP de 2013. Derrière l'abstraction froide de l'électronique se cache une forme douce de sons analogiques / acoustiques dits Post Rock qui au final produit une esthétique troublante.
mardi 16 avril 2024
Le canadien est un songwriter ultra productif (son dernier album contient 200 titres !) qui œuvre dans une Pop aussi délicate qu'elle peut être baroque, avec ce coté sans limite qui lui permet de surprendre l'auditeur à chaque instant. On croit connaitre ses petites vignettes pop par cœur, que l'on peut rapprocher de l'univers de Beck mais avec un supplément d'âme, notamment via les nombreuses pièces instrumentales qui lorgnent vers un down Tempo apaisant et mystérieux.
Loscil est le projet du stakhanoviste de l'Ambient hypnotique j'ai nommé le canadien Scott Morgan qui, avec ses 25 albums au compteur pour des labels prestigieux comme Kranky, a déjà constitué une œuvre gigantesque et remarquable. L'ombre de Brian Eno est bien présente mais non étouffante comme chez d'autres. A noter le très bel album collaboratif avec la pianiste de Seattle Kelly Wise.
Side-project de Jean Sebastien Nouveau (Immine, Recorded Home), Les Marquises ressuscitent avec bonheur l'esprit et l'esthétique d'un certain Post Rock fin 90's, tour à tour élégiaque, inquiétant, foisonnant, terriblement cinématographique, d’une inventivité et d’une densité rare. De grands passages abstraits côtoient des rythmiques lourdes et hypnotiques, le Jazz libertaire tutoie le Krautrock, bref c'est le retour du son de Chicago pour notre plus grand bonheur. En complément des titres de ce premier album on trouvera des versions remixées par Karaocake, Olivier Mellano ou Volcano The Bear. Le groupe a par la suite sorti d'autres opus, notamment chez Ici d'Ailleurs, ce qui ne surprendra personne.
Honteusement sous-estimé dans les 80's, à l'époque où le terrible Top 50 dictait sa loi infame aux radios FM complices, Les Calamités reviennent sous les feux grâce au formidable travail de réédition du label Born Bad Records. Quel bonheur de se replonger dans ce power trio féminin aux accents Pop Garage ravageurs et aux tubes potentiels (et un officiel, vélomoteur) invraisemblables.
Fameux duo britannique officiant dans l'Electro House depuis 25 ans, célèbre pour ses prestations au club The End drivé par l'ex-Shamen Mr C., Layo & Bushwacka nous offre ici un mix mêlant finesse et groove sorti chez le mastodonte Global Underground (pas toujours réputé pour la légèreté de ses productions) avec au programme Phonique, Tiga, Guy Gerber, Ritchie Hawtin ou Patrick Chardronnet. Une machine à danser imparable, le tout sous le soleil de Rio.
Obscure navet réalisé par Roger Vadim en 1971 avec un titre français accrocheur ("si tu crois fillette...") et bénéficiant d'un score 5 étoiles du maestro argentin Lalo Schifrin. Au programme Pop survolté, Jazz cool et aérien, bossa délicieuse et groove finement orchestré, bref la routine pour le créateur de bullitt.
La Bibliothèque De La Bergerie est le nouveau projet all-star initié par le producteur Emmanuel Mario (Astrobal). 11 titres instrumentaux, évocateurs et exaltants, passant du synthétique à l'acoustique, de l'écriture pop détailée à l’expérimentation sonore. Installés depuis des années dans une ancienne bergerie isolée du Sud de la France, Mario et Savary ont peu à peu rassemblé autour d'eux une bande d'artistes et de musiciens venant s'évader de leur quotidien. De cet espace de liberté hors du temps sont nées les compositions de La Bibliotheque De La Bergerie. On y retrouve les obsessions musicales de chacun des musiciens voyageant d'un morceau à l'autre: les soundtracks à la De Roubaix ou Alessandroni (Le Fleuve De La Nuit), la pop experimentale et classieuse type Stereolab/High Llamas (Loterie Solaire) ou encore les musique électroniques primaires et répetitives.
mercredi 10 avril 2024
L'immense trompettiste américain, au seuil de sa vie (il est mort 3 ans plus tard à l'âge de 84 ans), nous délivre un opus qui, par sa modernité Ambient Electro, évoquent les paysages sonores électroniques de Oneohtrix Point Never, Boards of Canada ou Aphex Twin. L'album (dont le titre Listening To Pictures évoque le « Pentimento », la superposition thématique dans l’art pictural) prolonge la très personnelle recherche sonore de Jon Hassell, entreprise depuis l’époque où il fréquentait Karl-Heinz Stockhausen, La Monte Young et Terry Riley, poursuivie à travers ses dernières expériences partagées avec Peter Gabriel, Björk, Brian Eno, Paolo Fresu ou Eivind Aarset.